PÉTROLE : Suite de la discussion avec Henri

16/01/2014 10:18

 

Économie et environnement

Réponse à Henri

En guise de réponse Henri, je commente simplement certaines parties de ton texte :

 (...) Par ailleurs, à condition d’extraction et de transformation égale, que cette exploitation se fasse au Québec ou ailleurs, cela ne change rien pour la planète. (...)

Je ne suis pas certain de partager cette affirmation. Une société qui fait le choix de ne pas contribuer à l'augmentation de la production pétrolière dans le monde envoie un message politique clair aux autres pays. On peut légitimement espérer que si des pays font le choix de ne plus exploiter leurs nouvelles ressources pétrolières, on assistera à une baisse de la production mondiale du pétrole et des gaz à effet de serre. Évidemment, il est peu probable qu'aucun pays ne prendra une telle décision, car aucun État ne voudra affaiblir sa position concurrentielle. Il y a fors à parier que les États vont plutôt chercher à s'adapter aux changements climatiques au fil du temps plutôt que de les prévenir. Dans une telle éventualité, les états les plus riches seront les plus innovateurs et devraient en sortir une fois de plus renforcés.    

 

 (...) Au début de nos études universitaires, la planète comptait environ 3,5 milliards d’habitants. Des «experts» de l’époque nous prévoyaient, ou prédisaient, c’est selon, que jamais, sans un nouveau système de production et de consommation alimentaire, la planète pourrait nourrir une population de 7 milliards d’habitants. Au  lieu de manger du bœuf valait mieux consommer directement des céréales. Avec le même système économique mondial, nous nourrissons aujourd’hui ces 7 milliards d’habitants (avec tout de même 900 millions de sous-alimentés) et la FAO nous indique que nous pourrions en satisfaire 12 milliards d’habitants, en éliminant les gaspillages. Toujours à la fin des années 1960 et au début des années  1970, le Club de Rome nous annonçait une pénurie de pétrole en 2000. Et pourtant, les réserves mondiales de pétrole d’aujourd’hui dépassent celles de cette époque !Tu connais aussi, Pierre, le discours apocalyptique de Malthus et son essai de 1889 sur la population. (...)

 

 

Les exemples que tu donnes sont probants. Je suis convaincu que les scientifiques ont aussi parfois des visées politiques et qu'ils se servent de leur pouvoir de scientifique pour avancer des scénarios catastrophes qui n'ont bien sûr rien à voir avec la science. Les environnementalistes n'échappent pas à cette dérive. Il faut donc se méfier de tels scénarios qu'ils viennent de droite ou de gauche. De façon générale, les sociétés modernes ont une grande capacité d'adaptation aux problèmes environnementaux qu'elles ont elles-mêmes créée.

 

 (...) Quant à l’opposition environnement et économie, je pense qu’elle n’est pas universelle. En effet,  l’écologie ne s’oppose pas au développement mais plutôt à un certain type de développement. La production pourrait être organisée autrement et être encore plus rentable pour les entreprises, eh oui, plus de profits ! – sans doute pas toutefois pour toutes les gagnantes actuelles. Économiser, recycler, utiliser moins de ressources en éliminant le gaspillage peut être très capitaliste ! (...)

Il faudrait opposer environnement et prospérité ou encore, pour reprendre une notion plus économique, l'idéal capitaliste d'un développement sans limites de la consommation et l'environnement. L'idée même de freiner le développement économique apparait suicidaire pour l'industrie. Le "développement durable" n'a de sens dans ce contexte pour les entreprises que s'il ne constitue pas un obstacle au développement économique. La réaction au "principe de précaution" est encore plus viscérale : la prudence qui invite à s'abstenir lorsque l'on ignore les conséquences de nos actions est complètement contraire à l'esprit même du capitalisme. Seuls la société civile et les gouvernements peuvent éventuellement faire contre poids et défendre une vision de l' économie plus respectueuse de l'environnement. C'est pourquoi, lorsque nos élites- je pense ici aux signataires de la lettre qui vient de paraître dans les journaux -  se servent de leur pouvoir charismatique pour convaincre la société civile de faire des choix responsables en choisissant la prospérité avant la protection de l'environnement, rien ne va plus. Je suis d'accord avec toi qu'il est possible de développer une autre économie qui assume et s'inspire des contraintes environnementales. Cela est possible à condition que l'on pense cette nouvelle économie dans l'esprit de freiner la consommation mondiale ce qui ne sera pas facile.        

 

Pierre